Chapitre 9 – Bando

Au même titre que Lionel D pour le rap, on a Bando pour le graffiti : notre précurseur, ou plutôt importateur, du graffiti à Paris.

Qui est-ce ? Ah ça, tu vas être surpris(e), Maggle. Parce qu’il vient pas du tout d’la cité le coco. Non non. Il vient d’Paname, Paname. Beaux quartiers, toussa toussa. En fait, son vrai nom c’est Philippe Lehman. Lehman… Ça t’dit quelque chose ? Crise financière de 2008, une certaine banque qui fait faillite ? Eh oui, Bando est le petit-fils d’un des fondateurs de la banque Lehman Brothers. Et tu vas m’dire, mais cette banque elle est américaine, c’est quoi l’rapport ? Haha, bah ouais. Basée à New-York exactement. Tu commences à faire le lien ? Laisse moi t’aider.

Fin des années 70, le graffiti s’installe à NY, remember? Bando, qui vient voir son père à NYC assez souvent, commence à découvrir ce mouvement et à y prendre goût, obviously. Il finit par rencontrer des gens du mouvement local, notamment Soy TWA et Taki 183, et puis lui vient l’idée (meilleure idée) d’importer le concept de GRAFFITI à Paris – et par conséquent, en France. J’appuie sur “graffiti”, parce que j’veux qu’on marque bien la diff’ entre ça et le street art. On y reviendra plus tard.

Mais revenons à Bando. Donc, oui, ce gosse de riches comme certains vont l’appeler, va se faire une place dans un mouvement de rue. Est-ce que du coup ça fait de lui un mec pas légitime dans le milieu ? Mais bien sûr que si ! Si tu t’souviens, le #hiphop c’est une histoire de talent, c’est faire beaucoup avec rien. Et Bando, qu’il soit le fils d’un tel ou un tel, il a fait des œuvres avec une simple bombe (plusieurs en vrai), non ? Et puis on lui doit bien d’avoir importé ce concept magnifique des US !  Rien que ça, c’est énorme. Et surtout on peut pas lui en vouloir d’avoir eu un coup de cœur pour ce mouvement… Fin bref, on s’en fout d’son background, juste regarde ce qu’il a laissé sur les murs stp, regarde !

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Et, j’vais l’répété s’il faut, c’est grâce à lui qu’on a découvert ça à Paris. C’est grâce à lui que d’autres s’y sont mis et ont taggé tout le quartier de Stalingrad à l’époque du terrain vague de La Chapelle. C’est grâce à lui que le lettrage est devenu un challenge pour certains et qu’il fallait donc être de plus en plus créatif. So, tu l’as compris, le graffiti en France c’est grâce à lui. Y en a même qui te diront que, encore aujourd’hui, personne ne lui arrive à la cheville en termes de lettrage. Donc… on lui doit beaucoup hein.

Et puis on en parlait touuuut au début déjà : heureusement que certaines personnes avaient les moyens de voyager, dans les années sans internet, pour faire découvrir des merveilles, comme le hip-hop, au reste du monde. J’dis ça, j’dis rien.

Maintenant qu’on a mis les bases, viens j’te parle vit’fait – ou pas si vite – du graffiti en France. Comment il est perçu à ton avis ? #Lol, bah comme le rap : un truc de sauvages encore. Pire même, le graffiti c’est un peu le synonyme de vandalisme. Salit les murs, pas beau, vilain, méchant méchant. Tu nous connais nous les français et notre conservatisme (j’dis “nous”, inclusion, pour pas qu’on commence à dire qu’ici aussi y a du racisme anti-blanc #tahu.)

Bref, la France, qui aime toujours crier au voleur avant d’analyser la situation, manque encore une fois de se poser la bonne question : mais pourquoi tant d’engouement pour ce mouvement qui défie les lois et casse les codes de l’art ? Mais peut-être parce que t’es (je tutoie mon pays, y a quoi ?) en retard et qu’dans 30 ans tu vas finalement mettre des millions dans un graffiti peint sur briques au milieu de ton salon, non ? Mais comme les français lisent pas dans le futur, forcément…

Sauf un. Un qui reconnait cet art, qui veut en comprendre le délire et qui décide de mettre en avant le mouvement : Jack Lang. Par contre Maggle, si tu sais pas qui est Jack Lang, je refuse que tu fasse la fête tous les 21 juin. C’est carrément un manque de respect là.

Bref. Ministre de la culture à l’époque, il inaugure en juin 1991, au musée de Meaux, 7-7, une exposition sur “l’art de la rue” (Gloire à) Truc de ouf, non ? Ce qu’on considérait comme du vandalisme est maintenant reconnu au point d’en faire une expo carrément inaugurée par un mec du gouvernement ! Ouf. Est-ce qu’il faut préciser que tout cela arrive quand la gauche passe au pouvoir ? #Lol ok, parlons pas politique. Pour le moment. Mais en tout cas, ça marque un tournant dans l’avenir du hip-hop. La reconnaissance commence à se faire.

Et pour revenir au graffiti lui-même et à sa place dans le hip-hop, j’te rappelle que tout le monde taggait. Genre TOUT le monde du hip-hop. Tous les artistes, même ceux qu’on penserait pas : Oxmo Puccino, Dany Dan… Déjà parce qu’on voulait niquer les murs, on est pas un peu rebelles nous ? et parce qu’encore une fois, c’est le premier moyen de communication du mouvement. Donc les artistes, pour pouvoir se faire connaître et rester dans les esprits, ils taggaient leur nom/pseudo partout dans la ville et surtout les métros 😉

Le graffiti après tout, c’est embellir la ville toujours d’une façon plus belle, plus technique. Avec l’excitation de l’interdit. Ce qu’il n’y a pas forcément dans les autres disciplines – sauf quand on décide de s’appeler Nik o Mouc #LOL.

Mais ce qu’il faut surtout retenir de son histoire, c’est que tout le monde, quelque soit son milieu, ses origines ou sa profession, pouvait tagger. La capacité à laisser une belle trace prônait. Le fait que ce soit une discipline plutôt anonyme faisait aussi qu’on ne savait pas forcément d’où venait chaque artiste : un charme en plus à cette discipline.

Sinon, ça va ? Tu suis l’délire et tout ? Si t’as des question ou des suggestions, faut pas hésiter ! Ici c’est eetzNana, démocratie et blog participatif 🙂

En tout cas, c’que moi j’retiens, c’est que le graffiti c’est beau, ça rassemble et c’est vieux (dans l’histoire). Plein d’gens différents autour d’une même cause, c’est pas c’qu’on veut nous ? Aujourd’hui il existe toujours mais on n’appelle plus ça graffiti. On appelle ça street art. Ça rassemble encore plus de gens, mais à quel prix ?

Peace

PS : petite, très petite, liste d’artistes graffiti qui ont impacté les murs de Paris dans les années 80 et 90 et dont j’aime les œuvres.

> JayOne, originaire de Guadeloupe, on l’appelle Black Picasso aussi. Il est fondateur du Bad Boy Crew (BBC).

> Azyle. J’sais pas si le nom à un rapport avec la folie qu’il peignait sur les métro mais sa marque de fabrique c’est sa signature taggée un milliard de fois sur les engins. De quoi rendre fous certains.

> Mode2. Un peu l’acolyte de Bando au moment de la naissance du mouvement à Paris. Il laissera aussi sa trace à Stalingrad. C’est l’un de mes favoris, ses graffitis sont juste #wow.

> JonOne. From NYC. Il vient à Paris fin des années 80 et s’associe à Bando pour embellir nos murs. Aujourd’hui il est en galerie et continue à faire de merveilles.

> Moze ODC, précurseur à Paris aussi, il est connu pour surtout avoir laissé sa trace sur la ligne 8 du métro.

 

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